Recycler les vieux remèdes

Il est des remèdes inoxydables: l’aspirine en est l’archétype. On lui trouve en permanence de nouvelles cibles thérapeutiques, moins maintenant pour soigner, que pour cadrer à moindre frais des déséquilibres physiologiques.

Et puis d’autres remèdes se retrouvent propulsés pour une seconde carrière. Ce sera sans doute le cas du baclofène, qui d’une molécule dédiée aux troubles musculaire, pourra soulager le “craving” des alcoolodépendants pour leur permettre un sevrage en douceur. Ce sera également, si les petits cochons ne le mangent pas, le cas de la kétamine qui a des résultats extraordinaires dans plusieurs types de dépressions ou de psychopathies, on retrouve là le profil de l’ibogaïne (voir encadré).

Sous licence Bayer (déjà!), cette aspirine dans son étui d’aluminium

Les labos sont bien sûr à l’affut de ces “ouvertures”, on se souvient du forcing exercé dans le domaine du SIDA pour écouler des stocks d’AZT qui était un anticancéreux mal toléré …

Les domaines les plus intéressants sont les sub-pathologies non installées, mais qu’on va soigner tout de même. Dans ce cas, les labos font un forcing sur les patients, afin que ceux-ci exigent la cure miracle à leur médecin, quitte à ce que ce soit hors AMM: ce fut le cas du Médiator, que bien des médecins ont prescrit “sous pression”.

A l’heure actuelle, trois molécules sont considérées comme très prometteuses pour lutter à la fois contre le cancer et contre l’ensemble des maladies dues au vieillissement:

l’aspirine: elle est très économique et on sait tout sur elle, depuis un siècle qu’on l’utilise contre la fièvre et la douleur. Et depuis dix ans, elle est prescrite à faible dose pour fluidifier le sang. Sans aucun dommage secondaire pour les patients, mais avec un cerveau mieux irrigué (ça se remarque au niveau mémoire et protection d’AVC) et des tumeurs qui si elles ont démarré, sont bridées dans leur développement qui nécessite une inflammation périphérique du tissu tumoral. Déja de nombreux médecins la prescrivent hors AMM sous couvert de son action fluidifiante.

– la metformine, elle aussi, est une “molécule de Papy” utilisée depuis 50 ans (en France sous le nom de Glucophage) dans le monde entier pour réguler des diabètes pas trop méchants. Cette molécule gère la glycémie, mais en même temps, elle régule tout un fatras de pathologies à priori différentes, mais qui s’emballent lorsque le diabète est installé. On sait donc maintenant que “sous metformine”, l’organisme subit (ou plutôt profite …) une véritable restriction énergétique. Le glucose est séquestré, il se fait plus rare au niveau des mitochondries, donc moins de ces molécules oxydantes qui entretiennent les maladies vasculaires et les dégénérescences neurologiques, ou qui provoquent des mutations secondaires dans les tissus précancéreux. De plus, en limitant le taux de glucose, carburant obligé des tumeurs, la metformine les prive de ressources.

On avait mesuré expérimentalement tous les bienfaits d’une restriction énergétique (lire Effervesciences  ), on les voit apparaître sous l’influence de prises quotidiennes de metformine.

les statines, elles , sont plus modernes , et on devra un peu s’en méfier avant d’en faire des panacées comme les deux molécules précédentes. En effet, elles ont été très employées (en France sous le nom de Tahor) dans le “traitement” du cholestérol. A ce titre, il s’agit de médicaments en déclin, voire montrées du doigt pour des effets secondaires de type cardio-vasculaires. Mais on leur trouve secondairement des actions anti-inflammatoires favorables pour la protection des vaisseaux sanguins, pour la régression de tumeurs, ou pour le maintien d’une bonne densité osseuse (régulation des ostéoclastes). Certains scientifiques s’étonnent de tant de qualités, et mettent les bons résultats sur la simple restriction de ces en cholestérol. Toujours est-il que les labos font actuellement le forcing pour trouver de nouveaux débouchés à ces statines dont les brevets sont expirés …

Peut-être le remède le plus prescrit en 2020 dans le monde entier ?

Et puis il y a cette hydrochloroquine, dérivée de la quinine des amazoniens, puis synthétisée sous le nom de nivaquine, utilisée mondialement depuis un siècle, améliorée plus récemment sous le nom de Plaquenil, et qui est aujourd’hui l’objet de polémiques mondiales, entre “ceux qui savent” et qui l’utilisent dans un domaine thérapeutique qu’on leur dispute: cette saleté de coronavirus. L’action de cette molécule se déroule dans les cellules infectées (par un virus, par un parasite), qui se défendent bien mieux contre les inflammations internes de la pathologie. C’est plus une molécule de protection qu’une molécule de soins. C’est l’option du Pr Raoult, contre l’avis de ses distingués collègues qui dans un vaste essai thérapeutique “convenable”, vont le prescrire à des malades gravement atteints….

A pleurer !

Jean-Yves Gauchet