Tchernobyl, rideau de fer: ces zones rendues à la Nature.

L’ex “rideau de fer” de l’est européen, comme les milliers d’hectares autour de Tchernobyl, sont des zones totalement libérées de l’emprise humaine. Un sanctuaire biologique qu’il est bon d’observer et de maintenir.

C’st un sujet très peu abordé en France … puisque notre pays a été à l’écart du Rideau de fer de la guerre froide …

Mais plus à l’est, voici un projet qui constitue un cadre de travail fédérateur entre des pays qui se sont longtemps ignorés, voire combattus : sous le nom de Ribbon of Life, c’est une bande étroite (quelques kilomètres) qui rejoint la Mer de Barents à la Mer Noire, sur le site historique du « rideau de fer ».

Les blocs de l’ouest et de l’est se sont figés en face à face durant une cinquantaine d’années. Entre les deux, une bande inhabitée d’une largeur de quelques kilomètres ponctuée de « check points », s’est étirée depuis les rives arctiques (Finlande) jusqu‘au Bosphore (Bulgarie) avec des circonvolutions dans la zone des Balkans. 

Au total: 13000 kilomètres de nature vierge démilitarisée, parfois souillée d’épaves militaires.

le “rideau de fer”, du temps de la guerre froide.

50 ans sans pesticides

Un gros intérêt : ces territoires oubliés n’appartiennent à personne (tout juste démilitarisés) et sur cinquante ans, n’ont subi aucune action chimique ou de bétonisation :

  • pas d’insecticides, donc conservation et essor d’insectes devenus très rares par ailleurs.
  • pas d’herbicides, donc jachères intactes et retrouvailles avec des souches ou des graines d’espèces qui ont régressé ou disparu dans les milieux voisins. Une étude plus profonde montre quels gènes ont été bousculés par l’environnement « moderne ».
  • les cratères dus à des obus ou à des explosions de mines ont créé autant de mares appréciées par la faune sauvage.
  • Les bords de rivières sont restés « bruts » : les cours d’eau ont continué à éroder les berges en créant des falaises et des bancs de sable, paradis d’oiseaux sédentaires ou migrateurs.
  • Le long de la cote nord (Baltique), un lacis de barbelés qui empêchait toute fuite des populations de l’est a préservé les dunes du littoral, dans son état originel.
  • La coupe forcenée des zones forestières (pour avoir une meilleure vue chez le voisin) a institué une gigantesque clairière linéaire, une bénédiction pour les animaux ou plantes ayant besoin d’un milieu ouvert.

Ce Ribbon of Life s’est institué sous l’impulsion d’un médecin allemand, Kai Frobel, et le démarrage s’est produit en Hongrie, à partir d’un parc national qui justement jouxtait la frontière orientale. Puis le mouvement s’est accéléré, les pays concernés ont adopté une politique commune en s’appuyant sur des ONG et des partenaires divers. Au passage, certains pays, comme l’Allemagne, y ont vu un moyen élégant de s’acquitter d’une « dette écologique «  qui devenait pesante.

Des zones adjacentes se sont intégrées au projet devenu global.

C’est le cas des anciennes mines de tourbes à ciel ouvert (ex Allemagne de l’est) désormais abandonnées à un sort purement écologique et intégrées également au programme Biosphères de l’Unesco.

La France est bien à l’écart de cette initiative. Mais en dehors des parcs nationaux et des zones humides protégées, certaines friches industrielles ou ferroviaires (voir en fin d’article) ont été gelées pour en faire des parcours cyclistes ou pédestres.

Si c’est radioactif, c’est préservé !

La  catastrophe de Tchernobyl a eu au moins un mérite, celui de montrer que la Nature se débrouille bien toute seule dès que l’homme a décampé … Une zone d’exclusion de 30 km autour de la centrale a été vidée de toute activité humaine. On s’attendait à un désert biologique, pire qu’après le plus grands incendies de forêts… La radioactivité aurait rongé les organismes, fait apparaître des mutations chromosomiques fatales…

Ce sont les cerfs et les renards qui occupent cette aire de jeux …

Hé bien non ! 

De fait, les espèces dépendant de l’homme (animaux d’élevage ou dépendant des ordures, comme les cigognes) ont disparu, mais les espèces indigènes bousculées par l’homme (lynx, ours, loups, chevaux de Przewalski) ont prospéré et on les retrouve résidents prolifiques de ces espaces désolés.

James Lovelock ne s’y est pas trompé : dans « la revanche de Gaïa », il assure qu’il serait urgent de déverser des déchets nucléaires dont on ne sait que faire, dans des zones à préserver comme l’Amazonie ou les forêts encore indemnes d’Indonésie

Pour lui, c’est le seul moyen d’empêcher l’intrusion funeste des hommes dévastateurs.

A lire dans ce blog: la radioactivité, source de vie

La Petite Ceinture ferroviaire de Paris

Imaginée sous le règne de Napoléon III, la Petite Ceinture est une voie ferroviaire très discrète (en grande partie sous forme de tunnels et de tranchées), qui avait pour but de réunir les réseaux ferroviaires en étoile autour de la Capitale, mais aussi de mouvoir des troupes et du matériel le long des fortifications.

Elle a été très utile, en particulier lors de l’expo de 1900, au rythme d’un train toutes les 30 mn. 

Développée originairement sur 32 km, cette voie ferroviaire a cessé de fonctionner en 1934 : métro et auto avaient  pris le relai.

C’est actuellement une voie de promenade avec des parcours écologiques (porte de la Muette), avec un regain de vigueur végétale  qui ne suffit pas à masquer les tags.

On peut y constater un silence insolite, ainsi que la présence d’animaux incongrus à Paris, comme des faisans ou des chauves-souris.s

Jean-Yves Gauchet