Les cagots: des “intouchables”dans les campagnes françaises.

Pendant quasiment douze siècles, toute une population repliée sur elle-même a subi rejet et ostracisme: les cagots. D’origine incertaine, ils se font reprocher un passé douteux, des pratiques démoniaques, un danger sanitaire. Alors qu’ils étaient avant tout victimes d’hypothyroïdie et d’endogamie.

Très présente dans le Sud-Ouest de la France, cette population victime de discriminations depuis le Moyen Age, est suspectée d’être atteinte de la lèpre (signes univoques : teint blanchâtre, sans lobe d’oreilles, peau laiteuse et parfois boursouflée). Les cagots sont de petite taille, ont les pieds palmés et parfois un goître. Parias à travers l’histoire leur origine est un mystère.

Certains érudits pensent qu’ils sont les descendants des Wisigoths, des Sarrazins ou des Cathares, repliés au fond de vallées pyrénéennes.. Maudits et humiliés ils sont soumis à de nombreux interdits : ils n’ont pas le droit de vivre dans les villes ou les villages, ils sont obligés de coudre un signe distinctif et infamant sur leurs vêtements (un tissu en forme de patte d’oie ou de canard), ils n’ont pas le droit de marcher pieds nus, de toucher l’eau, d’avoir des armes et de posséder du bétail.

Un préjugé moyenâgeux établissait que le bois ne transmettait pas ce fléau : pour cette raison les cagots étaient bûcherons, charpentiers, cordiers, tonneliers, construisaient des ponts et des navires….)

Les dirigeants savaient néanmoins utiliser leurs savoirs faire , en particulier dans le domaine de la construction. Exemple, le chateau de Montaner, édifié pour le compte du célèbre Gaston Fébus.

 En 1379, une négociation eut lieu avec des cagots du Béarn pour qu’ils travaillent à la charpente du château (réalisée en 1398). Les cagots passèrent un contrat de gré à gré avec Gaston Fébus, dans l’église de Pau, en présence de témoins, et par devant notaire où les cagots s’engageaient à la construction du château contre une exonération de taille. Pour le château, le maître charpentier cagot Pierre Doat s’engagea au nom des cagots à installer des fours pour y cuire 100 000 briques par an. Le 6 décembre 1379, quatre-vingt-huit charpentiers cagots s’engagèrent à fournir toutes les pièces de bois nécessaires, taillées, avec leurs ferrures, à les poser, à recouvrir les charpentes du toit de lauzes livrées sur place. Dans ce traité, les cagots s’engageaient à exécuter toute la charpente du château de Montaner, ainsi que les ferrures nécessaires, le tout, à leurs frais ; en revanche le prince leur accordait la remise de deux francs sur l’imposition de chaque feu (les « feux » correspondaient aux foyers ou familles), les dispensait de la taille, et leur permettait de prendre le bois dans ses forêts.

Porte des cagots de l’église de Sauveterre de Béarn.

Mais pour ce petit peuple, la vie est difficile. A l’église ils sont tenus à l’écart des autres fidèles et doivent rentrer par une petite porte. Un bénitier leur est affecté, et le pain béni leur est jeté pour éviter tout contact. L’accès de tous les lieux communs leur est interdit. Ils ne peuvent contracter mariage en dehors de leur caste. En 1607, Ambroise Paré informe que son observation clinique ne distingue aucun signe de la lèpre.

En 1683, un fait administratif bouleversera la donne, même si les attitudes n’évolueront que très lentement. Louis XIV et Colbert ayant besoin d’argent pour financer les guerres lointaines, l’Intendant de Béarn, M.Dubois du Baillet, devant la demande royale, d’imposer la gabelle au Béarn, à la Bigorre et à la Chalosse jusqu’alors épargnés sous les Albret, proposa que l’on donne la possibilité aux cagots d’acheter leur affranchissement ; l’instauration de la gabelle pouvant provoquer des émeutes. L’idée fut acceptée et les Lettres Patentes distribuées. Les cagots pouvaient devenir des citoyens à part entière et les interdits les frappant furent en partie supprimésSous le règne de Louis XIV, l’exclusion des cagots n’est plus approuvée par le gouvernement. Un décret marque le début de la fin des Cagots, qui deviennent libres de leur profession, de leurs mouvements, de se marier avec qui ils veulent.

Dans les années 50, les “derniers cagots”des Pyrénées.

Il faudra tout de même attendre le 18ème siècle pour que les préjugés disparaissent. Petit à petit, à force de métissage on assiste alors à la disparition des cagots. Dans les Pyrénées, le nom a persisté longtemps, car beaucoup de montagnards sont victimes de malformations, de goître, liés à la carence de sels minéraux et d’iode dans l’eau pure des sources.

Sources: Wikipedia       et     Origine Pyrénées