Une enquête sérieuse, mais qui ne débouche que sur des apitoiements de type “c’est pas moi c’est l’autre”. Les dirigeants de tous niveaux en sortent excusés par les failles du système médical. Brouillard sur l’incurie des tests, sur l’impasse aux soins, sur l’emprise des CHU et des agences, sur les évidents conflits d’intérêts labos-conseillers-décideurs.
C’est un petit ouvrage dont le titre est prometteur, mais à la lecture duquel on comprend vite qu’on va se confiner aux lamentations des différents acteurs de ce drame souvent fourré de guignolades.
En particulier, un sujet semble ignoré, sans doute un tabou qu’il faudra bien décortiquer un jour: celui de la prohibition aux médecins de tout soin aux malades, hormis l’inévitable et unique paracetamol … Prohibition implacable qui a coincé médecins et pharmaciens à refuser tout soin “non homologué”, et jusqu’à susciter la délation aux ordres professionnels et aux agences de santé, pour extirper du système les soignants égarés.
Dans cet ouvrage, n’est pas non plus évoquée la saga de ce médicament Remdesivir, recalé pour le Sida, recalé pour Ebola, néphrotoxique avéré, que l’Europe (la dimension européenne est absente de l’ouvrage) a néanmoins commandé et qui (heureusement) n’a jamais été utilisé.
Entre parenthèse, et c’est le vétérinaire qui parle, le remdesivir est particulièrement actif sur une maladie à coronavirus du chat, la péritonite infectieuse. Et toutes ces doses consignées, bientôt détruites, pourraient guérir des milliers de chats européens, dont les maîtres actuellement se fournissent dans un circuit opaque à coup de milliers d’euros. Quel gâchis !
Voici quelques “bonnes feuilles de cet ouvrage:
1 – combien de doses contient un flacon ?
Peut-on faire six ou sept injections de vaccin avec un seul et même flacon de Pfizer ? Risque-t-on de gâcher du précieux produit en n’utilisant pas tout ? Cette épineuse question a suscité des passes d’armes entre des médecins et l’administration. Le docteur Jean-Paul Hamon, médecin généraliste à Clamart, président d’honneur de la Fédération des médecins de France, s’en fait l’écho. « Avec des collègues médecins, nous commençons à faire les vaccinations dans les centres le 7 mars 2020, et nous nous rendons compte alors que l’on peut très bien faire des piqûres pour sept personnes avec un flacon de Pfizer, et non pas six, comme nous le dit l’ARS. Cela évite d’en perdre. Mais quand nous leur demandons l’autorisation de déroger au sacro-saint protocole, la réponse est non. C’est comme s’ils avaient la science infuse, avec leurs formulaires. Ils n’en ont pas grand-chose à fiche de ce que les praticiens de terrain peuvent leur dire. Résultat, cela a empêché de vacciner au moins 50 personnes dans la journée. » Le directeur de la communication d’une ARS, de son côté, se défend en évoquant les normes juridiques du contrat passé avec le fabricant. « Bien sûr, tout cela est compliqué pour les médecins. Mais nous sommes en charge de faire appliquer le droit. Si un accident médical se produit au cours de la vaccination et qu’un malade se plaint devant la justice, nous pouvons être jugés comme responsables si nous avons validé un protocole qui n’est pas le bon »
2 – La vaccination dans les Ehpad
Fin décembre 2020, sort un gros formulaire de 45 pages, intitulé « Guide d’organisation de la vaccination anti-Covid en Ehpad et en unités de soins longue durée » envoyé aux directeurs d’établissement. « Quand les équipes l’ont vu arriver, elles ont eu tout de suite mal à la tête. Cela paraissait tellement épais, déjà, et si complexe », plaisante à peine un directeur d’Ehpad. Le document, dans un souci d’exhaustivité, balaie toutes les problématiques… au risque d’en devenir abscons. Le premier chapitre s’appelle « Principes de planification », c’est tout dire.
Ce guide semble aussi pécher par excès de prudence : « Si la personne souhaite bénéficier d’un temps de réflexion supplémentaire pour permettre une meilleure compréhension des informations reçues et mesurer les impacts de son choix, ce temps de réflexion lui est bien sûr accordé. » Et casse-tête supplémentaire pour ceux qui doivent vacciner : « Le résident peut révoquer son consentement, par tout moyen, verbal ou non verbal, après l’avoir donné dans un premier temps, et ce jusqu’au dernier moment avant l’injection du vaccin. Le médecin a l’obligation de respecter cette volonté. » Plus tortue que lièvre. La complexité de la procédure va provoquer la colère des médecins… « Il aurait été plus simple de faire pour les collègues un résumé de trois pages, en leur disant quand vont arriver les vaccins, qui vacciner, plutôt que d’envoyer un tel pensum6 », s’énerve le docteur Patrick Pelloux, président de l’Association des médecins urgentistes de France.
3 – Les masques en folie …
Un bazar sans nom. La maire de Rennes, Nathalie Appéré (PS), a toujours du mal à s’en remettre. Elle gère une métropole de 220 000 habitants. Son récit de la crise des masques, du point de vue d’un grand élu, est assez incroyable. « En février 2020, je comprends qu’il se passe quelque chose de grave en Asie, et avec mon équipe nous mettons en place à la mairie une cellule de crise. Je suis frappée par le paradoxe entre ce que l’on voit à la télévision, en Chine, où tous les gens portent des masques pour les protéger de ce virus respiratoire, et le discours des autorités françaises qui disent que cela n’est pas utile. Pas convaincus, nous faisons un inventaire de nos propres stocks, au cas où… et on découvre qu’il nous reste 800 000 masques en stock, datant de la grippe H1N1, de 2009-2010, et ils ne sont pas périmés1. » Le plus étonnant est à venir. La « bonne élève » va être bien mal récompensée, dans un pays digne de Kafka. « Nous sommes à la mi-mars 2020. J’ai une discussion tendue avec l’ARS. Je les appelle pour leur demander l’autorisation de doter en masques nos personnels municipaux, mais aussi pour proposer d’en fournir aux agents qui interviennent dans des Ehpad. J’étais sûr qu’ils allaient s’en réjouir. Mais pas du tout. Au lieu de l’accepter, le directeur de l’ARS me fait au contraire des reproches, et me met en garde ! Il me dit : “Mais vous ne pouvez pas faire ça ! Les masques ne sont pas utiles pour protéger la population. Vous ne vous rendez pas compte de ce que vous faites. Et en plus, si vous faites cela, et que vous distribuez ces masques, cela créera une inégalité de traitement sur le territoire entre ceux qui en ont et ceux qui n’en ont pas.” » Bienvenue chez Ubu roi, puissance mille.
4 – etc, etc ….
Vaut néanmoins ses 45 minutes de lecture….
Le ministère des bras cassés, par Marc Payet, chez Albin Michel.