Nos repas du matin n’ont pas toujours été à base de café au lait, pain beurré et confiture. Ils étaient pris au petit matin, avec des ingrédients protéiques, suivis d’un en cas vers 10h, un repas de midi vite envoyé, et un repas du soir enfin conséquent. Donc pas du tout dans le sens de l’adage « repas du matin de roi, de midi de prince, du soir de pauvre ». Ces repas étaient conçus pour des modes de vie plutôt physiques, avec un temps de travail de 8 heures au moins, et sans la télévision au foyer. Et puis les choses ont changé…
Un ouvrage très récent fait le point sur notre nutrition, sous l’angle de la biochimie, et met l’accent sur des erreurs diététiques flagrantes, entretenues par Big Agro et ses préparations séduisantes bourrées de sucres.
Revenons à ce Cro-Magnon qui pendant des millénaires, a survécu de cueillettes et de chasse, ce qui a forgé notre organisme à supporter les coups durs. La journée était consacrée à une quête difficile d’aliments à manger au plus vite, souvent le soir même au cours du seul vrai repas pris en réunion.
Avec la sédentarisation, le travail de la terre, mais aussi les conflits ne modifient pas le rythme des repas : on mange peu et très tôt, et le « vrai repas » est au crépuscule, avant une longue nuit de repos.
Et ce même rythme s’est prolongé au Moyen-Age, et encore tout au long des siècles dans le monde paysan, mais aussi à l’ère industrielle, le prolétariat étant assigné aux mêmes horaires et mêmes rythmes de labeur.
Puis est arrivée, en particulier des USA, une tendance toute nouvelle, et radicalement différente : les céréales étant produites à foison, on pouvait offrir du pain raffiné, des corn flakes, et du sirop de maïs (riche en fructose).
On avait inventé ce nouveau « petit déj » bourré de sucres (bien sûr, au moins deux sucres dans le café) et , top du top, accompagné d’un jus d’orange.
Un problème restait bien caché : ces produits industriels, qu’il s’agisse du pain, du lait, des sucres ou des jus de fruits, sont devenus très pauvres en nutriments « vrais », les qualités nutritionnelles s’effondraient.
Comment fonctionne la digestion ?
En fait, au réveil, le corps humain n’a habituellement pas besoin d’apport en sucre. Il s’est fabriqué dans la nuit sa dose de sucre, naturellement, grâce au cortisol (pic du cortisol, de trois heures à sept heures du matin) qui le libère juste à point pour commencer la journée. A ce moment, notre taux de glycémie est de 0,9 g/l, et c’est tout à fait suffisant pour entamer nos activités. Ce sucre sanguin, consommé en cours de matinée, est rééquilibré par le foie qui en libère selon les besoins (consommation du glycogène hépatique, voire musculaire). Et c’est vers midi qu’on va « recharger » la machine avec un repas qui lui est alors nécessaire. Un déjeuner copieux ? C’est selon votre activité de l’après-midi …
En effet, la digestion d’un repas costaud va mobiliser environ 30% du flux sanguin, soit autant de moins pour des travaux musculaires, mais également pour les neurones du cerveau. Un gros repas, et c’est le « coup de barre » qui suit, on se met à piquer du nez (même sans avoir bu d’alcool…).
Les sportifs le savent bien, qui ne se chargent surtout pas l’estomac avant une compétition, quitte à vider un bidon d’eau sucrée juste au moment de l’effort final (10 km de l’arrivée dans une étape du Tour…).
Dans la vie courante, et comme chez les sportifs, il sera intéressant de manger un fruit (glucose et fructose naturels) sur le coup de 17h, ca qui ne changera pas la glycémie.
Enfin le soir, on peut s’offrir le luxe de bien manger, si possible en réunion, en prenant son temps : durant la nuit, aucune concurrence entre nos différents métabolismes, notre digestion est prioritaire et s’effectue avec le meilleur rendement.
L’insolente insuline
Chaque fois que notre sang se charge en glucides (en en particulier après le « ptit déj »), l’organisme cherche à faire passer ce glucose à l’intérieur des cellules : le pancréas produit alors une poussée d’insuline … qui va jouer son rôle, mais tellement bien qu’en moins de deux heures, le sang se trouve asséché de son sucre, l’organisme en réclame une autre tournée … ce sera le jus de fruit, la barre ce céréales, les bonbons. Encore un travail pour l’insuline… de fait, une bonne partie du sucre va se perdre dans les tissus gras (bravo !), et en quelques années le pancréas n’en peut plus de ces a-coups, c’est le début d’un diabète…
C’est quoi, un « ptit déj » correct ?
Dans l’ouvrage « La magie de la digestion », les auteures détaillent les ingrédients les plus adaptés :
- (puisqu’il en faut), le pain complet, plus long à digérer.
- les œufs
- l’avocat
- le jambon (avec du beure, s’il vous plait)
- les laits fermentés, les fromages
Avec pour boisson de l’eau (un verre d’eau plate avant toute prise alimentaire) et une tisane tonique (thé, gingembre, menthe).
Jean-Yves Gauchet
NB: cet article s’inscrit dans une polémique très active sur la hiérarchie des repas et le choix des nutriments. C’est ici une pierre à l’édifice ….