Dans son rôle magnifique du Dr Knock, Louis Jouvet a institué cette expression pseudo médicale : « ça vous chatouille, ou ça vous gratouille ? ».Ces deux sensations anodines devenaient des symptômes terrifiants. La chatouille serait plutôt agréable, mais comment l’expliquer ?
(article précédent: quant vous prend la gratouille”)
Si le prurit correspond communément à un désagrément, la chatouille est considérée comme un ressenti réjouissant … puisqu’il mène au rire.
De fait, peu d’études sérieuses se sont attachées à en savoir plus.
Les Anciens, comme Socrate, avaient bien remarqué que cette chatouille était agréable … un temps, mais qu’elle pouvait aussi déclencher de la douleur.
Si les animaux (sauf les singes ?) n’ont pas développé le rire, ils n’en sont pas moins sensibles à ces caresses insistantes qui provoquent un bien être tel qu’il est recherché par l’animal : le chat vient se frotter à nos jambes pour obtenir une caresse, il tend son cou pour bien désigner la zone de pelage qu’il voudrait caressée.
Chez l’homme, la chatouille est particulièrement appréciée par les bébés (qui seraient dans un stade chatons ?) avec pour zones favorables la plantes des pieds et le cou.
On aurait deux types de chatouilles :
- le contact léger et fugace (l’atterrissage d’une mouche, un brin d’herbe sur la joue) provoque une réaction de gène, et l’envie de se frotter (en réaction de défense ?). On est là dans un domaine qui ressemble au prurit, mais qui disparaît spontanément dès que la cause n’agit plus.
- Une pression répétée (et acceptée : elle n’est pas considérée comme un danger) sur des zones particulièrement sensibles (plus riches en récepteurs cutanés ?) va faire naître une impression agréable, une complicité, et enfin un rire nerveux qui se voudra communicatif : on se chatouille à plusieurs. En effet, l’auto-chatouille ne produit rien. Soit parce qu’il s’agit d’un phénomène social, soit parce qu’il existe un auto-contrôle au niveau du cerveau qui « sait » pertinemment que le ressenti correspond à un geste voulu … et que ce n’est pas rigolo !
Ce qui est sûr, c’est que la chatouille repose sur des récepteurs « softs » de la peau, les corpuscules de Meisner et de Paccini, qui informent le cerveau des contacts agréables. Ils apaisent le cerveau conscient (qui alors se laisse aller) et vont même jusqu’à provoquer la production d’endorphines pendant un temps très court (20 secondes maximum.
D’où cette sensation de plénitude, ce relâchement qui est favorable au rire.
Pendant ce laps de temps, ces endorphines neutralisent toute sensation de douleur, douleur qui pourrait survenir par irritation des fibres nues (celles de la douleur et du prurit), mais le ressenti douloureux va finir par émerger dès que les endorphines auront été « consommées » et donc inactives.
C’est ce qui explique que certaines chatouilles sont dans un premier temps un moment de bonheur, puis en un seul coup, devenues intolérables … au point d’être considérées comme un moyen de torture !
Angelina Viva