Les traitements antalgiques actuels sont “dose dépendants” en fonction du poids. Mais sans prendre en compte la physiologie spécifique des patient(e)s. Leur âge, leur sexe, sont pourtant des facteurs essentiels. Bien des choses à revoir …
La douleur est maintenant considérée non plus comme un symptôme, mais comme une pathologie à part entière, qu’il faut soigner énergiquement.
Prenez le Doliprane, ou toute aspirine de confort, les doses prescrites sont adaptées au poids, avec des précautions concernant les enfants ou certaines pathologies concomitantes, mais c’est quasiment tout.
Prenons le cas des femmes. Certaines douleurs leur sont spécifiques, comme les douleurs prémenstruelles, celles liées à l’endométriose ou aux vulvodynies, ou des maladies ou le sexe féminin est prédominant (fibromyalgie, sclérose en plaque).
Première question: concernant ces douleurs partagées par les deux sexes, comment comprendre que les femmes semblent nettement plus affectées ? Les hypothèses sont nombreuses.
Les oestrogènes sont en première ligne. Ils augmentent la sensibilité lors du cycle (n’oublions pas leur caractère YANG, pour les pratiquants des médecines orientales), alors que la progestérone, tout comme la testostérone masculine, abaisse cette sensibilité.
On évoque également un facteur social: les femmes seraient plus enclines à consulter, à répondre à des questionnaires d’enquête, que les hommes. Un biais peut-être non négligeable.
Mais la question essentielle est: par quel mécanisme les mêmes médicaments sont moins efficaces chez la femme? Question de dosage, ou bien de pharmacodynamie des mêmes médicaments ?
Des études récentes sont publiées, avec pour “patientes” des souris. Il apparaît que la sensibilité à la morphine, à douleur égale, est différente selon les sexes, et en intensité, et dans la durée. Les femelles ont besoin significativement plus de morphine que les mâles, et les effets d’une cure s’atténuent plus vite (6 jours contre 9 jours chez les mâles).
Pour explication, il faut aller voir le travail du foie. Une enzyme de dégradation (morphine3glucoronide) est plus efficace chez les femelles, et l’activité analgésique est très vite diminuée.
Voilà où nous en sommes sur les souris. De tels résultats devraient entraîner une remise en cause des traitements uniques dans leur prescription magistrale.
Sur le terrain, et avec l’éventail des patches de morphiniques, les soignant(e)s se permettent de doser “hors prescription” pour des douleurs intenses ou pour les accompagnements de fin de vie …
Mais pour l’immense majorité de leurs douleurs chroniques, les femmes sont régulièrement sous dosées. Bien des choses à revoir …
… Y compris le respect des rythmes circadiens des patients, c’est à dire en appliquant des principes de chronothérapie.
Source: Alice Bomboy, INSERM magazine.
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