L’ivermectine est connue d’abord comme antiparasitaire. Active sur plus de 300 parasites, la complexité de sa molécule fait qu’elle semble active aussi dans d’autres pathologies des plus variées.
Depuis plusieurs années, des cas cliniques, des études observationnelles, des études in vitro, rapportent des actions extrêmement variées sans rapport avec ses vertus premières, et dans des domaines où on ne l’attend pas, comme dans nombre de cancers, dans la sclérose en plaques ou sur nombre de virus.
Malgré toutes les indications connues ou suspectées, il est une chose que l’ivermectine n’est pas : un antibiotique. Du moins elle n’est pas connue en tant que tel, et pourtant !
Il se trouve que l’ivermectine, et des antibiotiques comme les macrolides, ont les mêmes grands-parents : ils font partie de la grande famille des lactones macrocycliques qui rassemblent différentes molécules venant de la fermentation des streptomyces. Les lactones macrocycliques sont classées en deux groupes : les avermectines et les milbémycines. Les avermectines ont une structure proche de celle des macrolides mais elles n’inhibent pas la synthèse des protéines ou de la chitine et n’ont aucun effet antibactérien ou antifongique, contrairement aux macrolides.
Certains travaux vétérinaires ont montré que l’association avec des antibiotiques pouvait booster l’ivermectine dans certaines maladies parasitaires. Et si l’inverse était possible ? Est-ce que des chercheurs curieux ont cherché une possible action sur les bactéries, voire comme pour les cancers une action permettant de booster des médicaments plus appropriés ? J’ai donc cherché dans la littérature, et il semble que l’ivermectine ait peut-être d’autres capacités encore inexplorées, inexploitées.
IVERMECTINE ET STAPHYLOCOQUE
Le biofilm est une membrane protectrice élaborée par les bactéries pour se protéger d’un environnement hostile, permettant également de résister à la défense immunitaire de l’hôte ou aux antibiotiques. Certaines substances peuvent détruire ce biofilm, ce qui ne tue pas les bactéries mais les rend plus vulnérables aux agents antimicrobiens ou aux défenses immunitaires de l’hôte.
En 2016 des chercheurs texans ont examiné 1 280 médicaments disponibles pour en retenir 104 efficaces contre le staphylocoque doré, avec une seconde sélection pour retenir 18 candidats jusque-là non considérés comme antimicrobiens. Et que retrouve-t-on dans le dernier carré ? L’ivermectine.
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En 2018 une étude canadienne a testé l’ivermectine sur plusieurs souches résistantes de staphylocoques au Pakistan, avec deux autres antihelminthiques (lévamisole et albendazole). Seule l’ivermectine a montré une « puissante » (selon les auteurs) activité anti staphylococcique. Ils ont obtenu cela à des concentrations moindres que dans l’étude précédente, rejoignant les produits les plus actifs contre le biofilm (6.25 and 12.5 μg/ml)
IVERMECTINE ET CHLAMIDIA
En 2022 des chercheurs italiens relatent le « potentiel antibactérien énorme et inattendu » en l’étudiant contre le chlamydia et les mycobactéries. Effectivement, on retrouve plusieurs articles sur le sujet, comme celle de Californie publiée en 2012 (lien à retrouver) qui démontre que « l’ivermectine inhibe l’infection par le chlamydia dans les cellules épithéliales ». Les doses utilisées étaient supérieures à celles de l’utilisation humaine, mais dans le même temps Pettengill et coll. dans cette autre étude également californienne, sachant que l’ATP (Adénosine tri phosphate) inhibait la croissance des chlamydia, montre que l’ivermectine rend les chlamydia plus sensibles aux traitements.
IVERMECTINE ET TUBERCULOSE
Cerise sur le gâteau : l’action de l’ivermectine sur les souches multi résistantes du bacille tuberculeux ! La tuberculose n’a pas fini de faire parler d’elle et l’on note dans le monde une recrudescence de la maladie, avec des souches qui résistent aux différents traitements antibiotiques appropriés.
Publié en 2013, on retrouve un article d’équipes newyorkaises et canadiennes, avec comme titre : ” Les avermectines anthelminthiques tuent Mycobacterium tuberculosis , y compris les souches cliniques multi résistantes “.
Ils ont examiné l’efficacité antibactérienne de quatre avermectines dont l’ivermectine et constatent : « Les avermectines ont été testées pour leurs activités inhibitrices contre diverses espèces de Mycobacterium en utilisant le test MTT. Ce test a déjà été utilisé pour tester la sensibilité aux médicaments de M. tuberculosis, et les résultats sont tout à fait cohérents avec d’autres méthodes bien établies. Les quatre avermectines ont inhibé la croissance des souches de laboratoire de Mycobacterium bovis BCG et M. tuberculosis à des concentrations allant de 1 à 8 μg/ml. »
CONCLUSION
Il semblerait donc que l’ivermectine puisse être un adjuvant efficace dans la lutte contre les bactéries résistantes. Ces faits sont connus depuis plus de 10 ans, mais il est peu probable que les recherches aillent plus loin malgré l’intérêt très important en matière de santé humaine. En effet, le système actuel oriente vers la recherche de molécules nouvelles, dont le prix de vente couvre les effets secondaires.