Les pieuvres sont des prédateurs diurnes qui cessent leur activité le soir. Leurs téguments sont sans cesse en modification de couleur et de texture. Ce comportement peut relever du signalement (communication entre individus, c’est particulièrement le cas lors des périodes de frai pour les mêmes comme pour les femelles).
Mais dans la plupart des cas, il s’agit d’un réflexe de camouflage pour leurrer soit un prédateur, soit une proie. De par leur tégument surchargé en cellules spécialisées, les pieuvres peuvent se transformer à la volée en bloc de corail, en éponge ou en banc de sable. Avec la couleur adéquate et la texture correspondante.
Ces modifications tégumentaires reposent sur trois éléments principaux.
1 – concernant la couleur, un système de pigments et de réflecteurs (quasi miroirs) permet de reconstituer la couleur et l’intensité lumineuse due l’environnement immédiat. Les pigments, allant du jaune au rouge, sont situés dans des milliers de saccules situés dans les strates supérieures de la peau, appelées lipophores., . Au repos, ils constituent des taches minuscules, mais des petits muscles peuvent écarter ces poches pigmentées et les couleurs se révèlent de manière à créer des motifs au plus proche des objets qui l’entourent.
2 – Les cellules réfléchissantes sont de deux types.
A -Celles qui renvoient la lumière qu’elles reçoivent : la peau du mollusque est alors blanche pour une lumière blanche, bleue pour une lumière bleue … l’animal devient quasiment invisible. Encore mieux, certains calmars « allument » sous eux des bactéries luminescentes qui éclairent uniquement vers le bas, ce qui annule les effets d’ombre, l’effacement est parfait !
B – Les secondes sont comme des bulles de savon qui par un phénomène d’irrisation, reflètent des couleurs différentes selon l’angle de vue.
Cette combinaison de couleurs et de renvoi-miroir permet aux pieuvres de présenter des couleurs et des motifs sans limite, et en temps réel des modifications du paysage sous marin.
3 – Les modifications de texture reposent sur la présence active de muscles cutanée qui peuvent contracter des portions de tégument pour les épaissir ou leur infliger des élevures qui pourront mimer des végétaux, des minéraux (galets, récifs), voire même des céphalopodes collègues et néanmoins concurrents quant on est en chasse ou en période du frai.
N’oublions par un élément supplémentaire de succès pour un camouflage réussi : la posture. De par sa position (allongée au maximum pour « coller » à un banc de sable, ou au contraire contracté et hérissé de cloques pour se mêler à des algues, la pieuvre sait donner à son corps la taille maximum pour impressionner, ou bien jouer l’effacement, quitte à détaler à la seconde où elle estime que sa ruse est éventée.
Jean-Yves Gauchet