“Courir comme un dératé”. Une expression commune, qui insinue que la rate serait un obstacle aux performances… à cause du “point de côté” ?
Le point de côté, c’est cette douleur siégeant à gauche, à l’arrière de la partie inférieure du thorax, c’est à dire dans une zone où flotte la rate, cet organe spongieux de quelques 200 grammes.
Dans le domaine médical, on est plutôt sceptique quant à cette collusion entre la rate et ces douleurs à l’effort.
Certains évoquent une irritation de la plèvre (l’enveloppe des poumons), d’autres accusent l’aérocolie qui est une accumulation d’air dans le gros intestin. Tout ceci dans un contexte physiologique compliqué, puisque la détermination de l’origine précise des douleurs viscérales n’est pas aisée. Autre exemple, la douleur de l’infarctus du myocarde peut irradier les épaules, , mais aussi les bras ou la mâchoire…
D’oû un retour à la case “rate”, déjà bien ancré chez les Anciens. Selon la théoris des humeurs, la rate était censée accumuler la bile noire ou atrabile (ou encore mélancolie) et en assurer l’évacuation. D’où la crainte d’une obstruction de ce viscère.
Par les éxégètes de Rabelais, on apprend qu’à son époque, on disait plutôt “rire comme un dératé”, comme quelqu’un qui serait débarassé de son atrabile, et qui aurait retrouvé la bonne humeur (encore une histoire d’humeur!). Et dans le langage populaire, le mot “rire” se serait transformé en “courir” … d’oû l’expression retoutée par nos sportifs …
Jean-Yves Gauchet