Ces récepteurs d’amertume ont une fonction de reconnaissance gustative sur la langue, mais se retrouvent dans tout l’organisme avec des rôles spécifiques, de type nerveux ou bien immunitaires.
Le schéma ci-dessus représente un récepteur d’amertume, de type TAS2R. Chaque petit point bleu représente un type d’acide aminé, l’ensemble constituant une grosse molécule protéique à cheval sur la membrane cellulaire des bourgeons du goût.
Selon les différents acides aminés, on aura une affinité particulière pour des molécules qui sont de passage au plus près des bourgeons sensibles.
Ces molécules sont comme des clés correspondant à un type de serrure … qui s’ouvre lorsqu’elle y pénètre. Chez l’homme, on a identifié une trentaine de récepteurs de type TAS2R, à qui on a attribué des numéros d’identification.
Certains récepteurs sont strictement spécifiques d’une seule molécule amère (qu’on appelle alors ligand), alors que certains TAS2R réagissent à plusieurs ligands.
Inversement, certaines molécules sont reconnues par plusieurs récepteurs, alors que d’autres n’agissent que sur un modèle unique de récepteur.
TAS2R46 est un exemple d’une grande largeur de spectre de réactivité. Il est activé par 21 substances amères.
Inversement, la colchicine active les TAS2R4, le TAS2R39 et le TAS2R46.
La quinine fait partie des substances qui activent le plus grand nombre de TAS2R (neuf), dont le TAS2R4, TAS2R7, TAS2R14, TAS2R10, TAS2R46.
La Nature (essentiellement dans le domaine végétal) a multiplié les types de molécules amères, plusieurs centaines. Ce qui fait qu’en face, les animaux “consommateurs” de ces substances ont eux aussi multiplié les types de récepteurs, vingt cinq chez les humains.
Ces récepteurs d’amertume sont ainsi très nombreux sur les papilles de la langue, où ils jouent alors un rôle de vigilance sur ce que nious ingérons.
Mais on va (voir plus loin) les retrouver dans tout l’organisme (tissus respiratoires, digestifs, urinaires, et jusqu’au coeur). Ils sont alors groupés dans des petits “buissons” cellulaires, appellés cellules touffes.
Leur rôle est encore pour beaucoup à découvrir, ils agissent localement, en réaction à des molécules amères, parfois d’origine respiratoire ou alimentaire, mais aussi d’origine bactérienne.
– Dans les tissus épithéliaux, comme ceux des voies aériennes, les TAS2R deviennent un système immunitaire inné qui peut provoquer une destruction de bactéries, et de virus.
– Chez les macrophages, les TAS2R peuvent provoquer une action anti-inflammatoire.
– dans le tissu cardiaque, une modification de la contractilité cardiaque et du tonus vasculaire global.
Une autre caractéristique des récepteurs TAS2R, au delà de leur sélectivité, c’est leur affinité pour telle ou telle molécule amère.
Ainsi, il faut trente fois plus de caféine que de quinine pour produire la même activation des récepteurs à l’amertume.
Et cette proportion varie également considérablement selon les individus à l’autre. On a chez les humains une sensibilité génétique à l’amertume qui va guider nos goûts alimentaires, mais aussi nos réactions respiratoires ou digestives.
Comme nous le verrons plus loin, les individus qui ressentent moins l’amertume sont plus sensibles aux problèmes pulmonaires et bronchiques, et plus enclins à développer une obésite et un diabète.
Nous allons nous attarder sur un type de récepteur qui a été bien étudié, le TSA2R39.
On le retrouve bien sûr en bouche, mais également en localisations extra-buccales, dans plusieurs types de tissus, y compris le cerveau, le système respiratoire, le système cardiaque et même le système reproducteur, où ses fonctions ne sont pas encore bien établies.
TAS2R39 est une protéine longue de 338 acides aminés qui possède sept domaines trans-membranaires (numérotés de I à VII).
L’accrochage d’un ligand entraîne une cascade de réactions moléculaires de différentes protéines (dites protéines G) qui va exciter différentes capacités réactives de la cellule selon chaque tissu récepteur en fonction de leur rôle physiologique.
Le récepteur TAS2R39 est réactifs à de nombreux ligands. Les premiers étudiés ont été les catéchines du thé, puis on a ajouté les génistéines du soja, et ensuite une floppée de 67 flavonoïdes, puis encore la vanilline, puis encore des acides aminés comme la phénylalanine et le tryptophane.