En ces moments douloureux où le coronavirus fait vaciller nos existences, il est intéressant de se tourner vers le passé. Sars, grippe espagnole, peste ? Ici, nous détaillons une épidémie récurrente qui a touché l’Angleterre au XVème siècle …
C’est un évènement médical hors du commun, qui s’est produit en Angleterre de 1485 à 1551, à cinq reprises, et puis plus rien …
Les premières alertes commencent en 1485: des villes entières sont frappées, selon des périmêtres extrêmement précis. Les symptômes sont d’emblée très violents, et les premiers morts se déclarent au deuxième jour.
Les malades se plaignent de maux de tête insupportables, de difficultés respiratoires. Ils meurent (90% de mortalité) dans des litres de sueur (d’où le nom de la maladie, la suette) nauséabonde et dans des délires parfois dangereux. Puis leur dépouille se décompose à une vitesse étonnante.
Bizarrement, ce ne sont pas forcément les plus pauvres, sans hygiène, qui pâtissent de l’épidémie, mais plutôt les classes aisées, dans des zones pourtant protégées.
En plusieurs vagues, la suette décime des villages et des quartiers entiers de villes dans toute la Grande-Bretagne (sauf l’Ecosse).
Deux siècles plus tard, la suette réapparaît sur le continent, moins mortifère, plus axée sur des symptômes cutanés, c’est la suette miliaire. Puis elle disparait pour de bon (?) en Saintonge, en 1886.
Les médecins de l’époque ont bien fait la différence avec les maladies courantes comme la peste et des autres épidémies, par sa sudation caractéristique, et par sa progression foudroyante vers la mort.
L’extrème précision géographique, les conditions climatiques constantes (froid humide) des épidémies, laissent à penser qu’il faut un vecteur local pour porter le germe.
Insecte, acarien, ou rongeur ? On n’observait pas de trace de piqure ou de morsure.
Les symptômes évoquent une encéphalite foudroyante, avec production d’enzymes et des substances basiques qui accélèrent la putréfaction. Due à des bactéries (24 heures, c’est un peu juste), des virus (24 heures, c’est très juste!) ou des parasites du sang ? Du fait de la putréfaction, il ne reste aucune dépouille à étudier …
Mais un ouvrage du Dr Lebled, qui décrit l’épidémie de suette miliaire dans un village d’Indre et Loir en 1857, montre l’efficacité étonnante (la mortalité disparait) de la prise précoce, aux premiers symptômes, de sulfate de quinine (l’ancêtre de notre nivaqine…) à forte dose (un à trois grammes). Lebled remarquait également que les zones touchées étaient similaires: des zones humides, marécageuses, le long de la Loire. La suette ressemble alors bigrement à un paludisme atypique …