Miser sur la seule nicotine pour sevrer les addicts, c’est oublier qu’une plante est un assemblage de dizaines de principes qui agissent ensemble. Et c’est encore valable pour le cannabis, dont la médecine ne retient que le CBD.
La controverse actuelle sur l’efficacité des substituts nicotiniques constitue un excellent exemple des limites de la phytothérapie monomoléculaire.
Selon une étude américaine (revue Tobacco control), il s’avère que l’usage de patches et chewing-gums à la nicotine, n’apporte qu’une maigre amélioration à long terme sur le succès d’une tentative de sevrage tabagique. On arriverait péniblement à 20% de résultats après les rechutes.
Et dans les termes cités, repose tout le problème: d’un coté le sevrage TABAGIQUE, donc par rapport à la consommation (par combustion, mais aussi par prise orale) des feuilles d’une plante, et de l’autre des substituts NICOTINIQUES, qui ne contiennent qu’un seul type moléculaire, la nicotine.
D’un coté, des dizaines de composants, nous dirons en grimaçant: ”naturels”, et encore une bonne dizaine de cochonneries (caramel, arômes divers) destinées à amplifier et accélérer l’effet “flash” de la première bouffée, et à introduire des arôme qui ajoutent du plaisir à la “récompense” pharmacologique due essentiellement à la nicotine.
En fait, le fumeur est un addict à tout ce triste mélange, et il est illusoire de penser que la prise de nicotine pure remplira le rôle de substitut. D’autant que les récepteurs nicotiniques par eux-mêmes ont une fonction essentielle dans l’organisme, et que de les saturer avec du produit pur entraîne fatalement des déséquilibres qu’il faut alors eux-mêmes corriger!
Voilà typiquement alors un sujet de thérapie où excellerait le médicament placebo!
Et l’on répète les mêmes erreurs avec le cannabis… Le système médical, bien conscient des bienfaits de cette plante sur les nausées, les douleurs (cancers), les anorexies, le glaucome, les crises d’asthme, et bien d’autres affections, a rendu un verdict bête à pleurer: on n’autorisera que la molécule cannabiniol (CBD), une gentille molécule qui a effectivement quelque effet, mais rien à voir avec les résultats observés lorsqu’on utilise la plante brute (le totum) qui apporte une trentaine de molécules différentes issues de cascades métaboliques qui dépendent de la plante, de la saison, du séchage … toute une alchimie naturelle dont les malades ne profiteront pas…
Retour sur notre article sur l’action de la nicotine sur le Covid:
Dans ce cas, et si c’est bien la nicotine qui via certains récepteurs communs perturbe l’action du virus, il est évident que dans ce cas, on n’a pas besoin su totum de la plante, et la molécule nicotine serait alors le médicament.
Jean-Yves Gauchet