L’amertume, cette saveur désagréable qui nous soigne (1)

Cette saveur amère, peu appréciée spontanément, est un signal d’alerte pour l’organisme, en bouche bien sûr, mais également dans tout le corps où des récepteurs spécifiques détectent les molécules amères, et mettent en route des réactions de défense et de modulation immunitaire. Une saveur qui protège notre santé !


Depuis quelques années, les laboratoires de recherche se passionnent pour les substances amères (des centaines de molécules, essentiellement issues de plantes), leur place dans la phylogénie des végétaux, leur rôle dans la co-évolution plantes/animaux, dans notre propre historique alimentaire, enfin dans les effets bénéfiques qu’on peut en attendre.

C’est passionnant et prometteur. Je vous promets une quinzaine de billets sur ce sujet. Bienvenue dans les prémices de l’amérothérapie.

Donnez à boire à un bébé un biberon d’eau sucrée … il va tendre ses lèvres et développer un réflexe de succion: il est réceptif et joyeux. Tendez lui un biberon rempli d’un jus d’endives cuites (amertume garantie), vous verrez ses lèvres s’écarter, ses sourcils se rapprocher, avec un rejet de salive et des cris de protestation.

Ainsi, bébé, et de manière innée, se méfie de l’amertume, et en rejette les supports alimentaires.

A ce stade du récit, souvenez vous des endives, des épinards qui vous étaient proposés (imposés) à la cantine de l’école. Il en repartait la moitié. Alors que pour les diététiciens scolaires, c’étaient des aliments d’excellence.

L’industrie agro-alimentaire a plus d’un tour dans son sac: elle a planché sur le problème, et à force de croisements et de sélection des végétaux toujours moins amers, elle nous a sorti des légumes (artichauts, pissenlits-salade, tomates, endives …) pour lesquels l’amertume n’est plus qu’un lointain souvenir. Et qui du coup se vendent même aux palais les plus délicats.

Mais en même temps, on assiste à une fragilité des plants, désormais hypersensibles aux insectes et aux champignons: il faut désormais forcer sur les pesticides, là où les mêmes espèces se développaient naturellement .

Soit dit en passant, ce sont souvent les mêmes “majors” de l’agroalimentaire, qui gèrent la génétique de nos légumes, et qui produisent les pesticides pour assurer leur culture.

Ainsi, au niveau des plantes, le retrait des substances amères naturelles semble entraîner une fragilité de leur santé. Intéressant!

Est-ce qu’à l’inverse, l’emploi de molécules amères sur des organismes fragiles leur procurerait une résistance améliorée? Concernant les végétaux, on sait bien que les extraits de tabac (nicotine, très amère) ou bien les “purins d’ortie”, ont effectivement un effet protecteur prouvé et d’ailleurs utilisé en agro naturelle (avec des interventions éhontées de l’agro-business pour en interdire l’usage).

Donc, ces principes d’amertume ont un effet protecteur. Chez les végétaux (dont ils sont issus) oui, mais chez les animaux ? Et chez les humains ?

Pour la suite, à bientôt …