Substances amères: une option thérapeutique pour les vétérinaires.

Comme développé plus haut dans ce blog, les substances amères représentent un domaine inexploité de la phytothérapie, mêlant l’énorme expérience séculaire des anciens, avec les toutes dernières connaissances sur les récepteurs cellulaires.

L’action de substances amères sur des récepteurs répartis dans tout notre organisme (en non pas seulement en bouche, comme on l’a cru si longtemps…) constitue un savoir très récent, et actuellement un thème de recherches dans les labos du monde entier.

Ces travaux récents mettent en avant une réalité étonnante: dans tout notre corps, donc au delà de nos papilles gustatives de la bouche, nous possédons avec des récepteurs d’amertume, un réseau d’alerte et de régulation qui fait réagir nos différents organes, contre inflammations et infections pour le système respiratoire, contre l’hyperglycémie et le diabète pour le système digestif, et bien d’autres actions qu’on découvre peu à peu.

Comment ces molécules, dédiées à une défense contre des dangers physiques, se retrouvent en première ligne contre des maladies infectieuses ou métaboliques? Ce n’est que récemment qu’on a compris que les récepteurs d’amer (T2R) étaient essentiellement dans nos différents organes dévolus à reconnaître des molécules issues du métabolisme des bactéries pathogènes (acyl-homosérine lactones ou AHL, présentes dans des biofilms bactériens), et que ces substances bactériennes ont des conformations chimiques très proches de nos substances amères.

Les récepteurs d’amertume perçoivent des signaux lors d’infections bactériennes, et font réagir les tissus (ici une muqueuse respiratoire) par la production d’oxydide cils vibratilesnitrique, un puissant bactériolytique, et par l’excitation des cils vibratiles qui évacuent le mucus chargé en bactéries.

Hasards de l’Evolution ? Nos organismes se sont équipés, on pourrait dire gratuitement, d’un système immunitaire inné, d’action immédiate: On peut résumer, en disant que l’amertume mime une infection bactérienne.
Tout cet acquis sur les amers s’est élaboré depuis quelques années, il reste bien des lacunes concernant les relations amers/récepteurs T2R, et sur les actions pharmacologiques qu’on peut envisager avec tel amer pour telle fonction, ou telle pathologie. Le schéma suivant en est le résumé.

Car les amers ne sont pas des remèdes “anti”, comme les anti-inflammatoires ou les antibiotiques, mais plutôt des régulateurs qui informent notre organisme qu’il dérive, qu’il se met en danger, et qu’il peut réagir et prendre le dessus par ses capacités propres.

Ainsi, nous possédons un système d’alerte et de régulation qui réagit en. cas d’infection (en quelque sorte un second système immunitaire inné), mais qui reconnait également des substances amères pour réagir tout aussi bien.

Ces substances amères, essentiellement d’origine végétale, doivent être acceptées au niveau gustatif: trop violentes, ou trop abondantes, elles sont toxiques, et le premier réflexe est de les rejeter, voire de les vomir.

Mais utilisées avec le bon choix et en quantité raisonnée, elles apportent un sang neuf à la phytothérapie puisqu’on peut désormais viser les récepteurs voulus, avec les substances les plus adéquates pour un résultat qu’on peut déjà constater: une régulation de nos organismes en douceur (oui il faut plus de temps pour réguler un eczéma que par l’sage de corticoïdes…) mais sans effets secondaires, et avec un élan physiologique “dans le bon sens” des tissus concernés.

Ces récepteurs, l’Evolution les a développés et (ou) conservés selon une utilité vitale. En particulier comme système d’alerte contre des substances toxiques. Les herbivores sont donc très bien pourvus, puisqu’ils ne mangent que des végétaux. Les omnivores, comme les humains, en ont moins (25 récepteurs reconnus actifs, et autant catalogués par leurs gènes, mais sans qu’on en connaisse les actions).

Au fait, le saviez-vous ? Je suis vétérinaire, mais aussi chercheur dans ce domaine de la santé animale: alors lisez la suite …

Quant aux carnivores comme nos petits chiens et chats, on ne leur a identifié qu’une demi-douzaine de types de récepteurs T2R, qui sont répartis en bouche, mais aussi le long des systèmes respiratoires et digestifs et dans la peau, sous l’épiderme.

Prenons le chien: il est pourvu de récepteurs T2R de type 16, 38, 43 et 46 dans son tissu sous cutané. Pour les races sujettes à l’atopie (une propension génétique à des irritations cutanées chroniques), un cocktail judicieux de substances amères délivré en lotions permet de soulager ces prurits, avec en prime une action anti bactérienne que n’apportent pas les corticoïdes. Encore mieux, on a constaté que l’origine principale de cette inflammation est la production d’une cytokine (Interleukine 31) par des lymphocytes cutanés, lesquels sont neutralisés en nombre et en vigueur par les récepteurs T2R… Le remède (très actif, mais très cher) de l’atopie canine, est actuellement le cytopoint, un anticorps monoclonal qui neutralise … L’interleukine 31 !!!

Chez le chat, je me suis restreint à des actions de soins sur des pathologies respiratoires (toux chroniques, asthme), mais avec des résultats tout à fait encourageants …

Conclusion provisoire: une phytothérapie raisonnée nous tend les bras. Tant pour les humains que pour nos compagnons à 4 pattes.

Pour en savoir plus, venez visiter ce site très complet: https://theraps.fr/

Pour me contacter directement: gauchet31@gmail.com

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admin1402

Vétérinaire à Toulouse, je gère bénévolement ce blog suite à l'arrêt de parution du journal "paper" Effervesciences" survenue durant la crise covid. Désormais, les infos sont en ligne, gratuietement.