Dans les nids de mésange bleue, on trouve un assortiment d’herbes aromatiques., en général spécifique du terroir. Une action anti-parasitaire, oui, mais par quel procédé ?
Dès la fin de la construction du nid, donc avant de pondre et ce jusqu’à l’envol des poussins, les mésanges déposent sur la partie supérieure de leur nid des fragments d’herbes aromatiques riches en composés volatiles.
Seules, les femelles s’y adonnent pendant que le mâle apporte les matériaux “de construction” du nid. La femelle est elle herboriste ? Toujours est il qu’elle sélectionne des fragments des différentes plantes odorantes qui poussent aux alentours, et cette composition est en quelque sorte sa signature chimique: autant de nids dans un lieu donné, autant de “signatures” différentes.
Ces préférences individuelles se sont avérées constantes non seulement au cours d’une même saison, mais aussi d’une année à l’autre.
Comme ces émissions volatiles des fragments de plantes s’atténuent et disparaissent avec le temps, la femelle renouvelle régulièrement le bouquet, en conservant le même assortiment végétal.
Question brute: à quoi ça sert ?
Ces plantes servent bien entendu à quelque chose. Et nous allons parler parasitisme.
Les nids d’oiseaux comme les mésanges sont aussi des paradis pour les parasites dont d’innombrables espèces profitent de la manne que constituent ces poussins immobiles et entassés au fond des nids chauds et humides. Ces parasites trouvent ainsi le gîte et le couvert dans cette ambiance protectrice. Et pour la plupart, ce sont des larves hématophages de diptères qui se nourrissent du sang des oisillons, mais qui participent également à des infections bactériennes.
Les mouches par elles mêmes sont inoffensives, mais en pondant dans le nid, elles provoquent une éclosion d’asticots qui sucent le sang après avoir planté dans la peau des oisillons les puissants crochets qui entourent leur ventouse buccale. Cette ponction sanguine peut représenter jusqu’à la moitié du volume sanguin total de la nichée. Pour faire survivre les oisillons anémiés, les parents sont obligés de multiplier les repas, donc les trajets à la recherche de proies (autres larves d’insectes), et on a pu observer que lorsque le nid est parasité, les parents font jusqu’à 65% de trafic alimentaire en plus. C’est épuisant !
Donc, la présence des ces herbes aromatiques a un effet posoitif sur la santé de la nichée.
Mais par quel procédé? La première idée, qui vient immédiatement, c’est que les huiles essentielles de ces fragments de feuilles sont répulsifs ou larvicides: elles tuent les larves, ou les éloignent, et le nid en est débarrassé …
Hé bien non …En fait il y a quasiment autant de larves au nid, avec ou sans herbes rajoutées. En fait, l’action des principes volatiles se porte sur les bactéries cutanées qui sont préjudiciables aux poussins dont la peau est couverte de microplaies causées par les morsures d’asticots.
L’effet de cette phytothérapie aviaire est donc indirect: même si la ponction sanguine exercée par les larves reste la même, la meilleure santé des nichées protégées prouve que les parents arrivent à compenser (en partie ?) les désordres dus aux larves.
Bel exemple de ce qui fait la biodiversité, ici qui implique une espèce d’oiseau, plusieurs larves de diptères, des micro-organismes pathogènes, et un bouquet de plantes aromatiques …
Mais ces plantes qui soignent les oisillons, quelles sont-elles? On en trouve la description dans l’un passionnant ouvrage “La mésange et la chenille”, écrit à plusieurs plumes par des biologistes ornithologues, essentiellement dans des écosystèmes de Corse:
- l’achillée millefeuilles Achillea
- la lavande Lavandula
- l’immortelle Helicrysum
- la germandrée Teucrium
- la menthe Mentha
Source: la mésange et la chenille. Sous la plume de Jacques Blondel