La claque au théatre, c’était un métier…

Au XIXème siècle, l’Opéra , comme de nombreux théatres, utilisaient les services rémunérés de “claqueurs” qui, se mêlant aux spectateurs, installaient dans la salle l’ambiance souhaitée. Procédé repris (rires, applaudissements, huées) dans les émissions TV les plus actuelles…

Préparation de la claque avant une séance, dans leur café de la rue Favard.

La claque est un ensemble de personnes (les « claqueurs ») engagés pour soutenir ou faire trébucher une pièce par des manifestations bruyantes (applaudissements, rires, sifflets, huées, etc.).

La pratique de la claque trouve son origine dès l’Antiquité. Ainsi, lorsque Néron jouait, cinq mille de ses soldats saluaient sa performance par un éloge chanté. Développée au xvie siècle par le poèteJean Dorat qui achetait un certain nombre de billets pour la représentation de ses pièces qu’il donnait ensuite en échange d’une promesse d’applaudissements, la claque moderne s’est continuée au XVIème siècle dans les cabales contre les auteurs ou la concurrence féroce à laquelle se livraient les actrices.

La claque apparaît à l’opéra avec le système des abonnements au début du xviiie siècle. En 1820, elle s’est systématisée avec l’ouverture à Paris d’une agence destinée à fournir et à gérer des claqueurs, qui, moyennant une somme convenue et un certain nombre de billets, se chargeait de faire applaudir une pièce. La claque, appelée en langage juridique entreprise de succès dramatiques, consistait au XIXe siècle dans un contrat entre un directeur de théâtre et une personne appelée chef de claque. Dans les théâtres subventionnés, ce chef était un employé du théâtre, recevant des appointements fixes, et dont les fonctions consistaient à recruter un certain nombre de spectateurs s’engageant moyennant l’entrée gratuite à fournir les applaudissements demandés.

Le grand jour arrivé, l’entrepreneur rassemblait ses gens, qui recevaient chacun un billet de parterre, unique salaire de leurs applaudissements. Assis au milieu de l’arène, entouré de ses vaillants satellites, on le voyait ensuite donner, par son exemple, le signal des battements de mains. Quelquefois l’entrepreneur était dirigé dans sa marche par les instructions écrites de l’auteur qui lui indiquaient les endroits où il fallait applaudir ; d’autres fois il n’était guidé que par son propre génie.

Les claqueurs, vus par Daumier

Les auteurs ne furent pas les seuls mettant à contribution le talent d’un entrepreneur de succès ; les artistes dramatiques y eurent fréquemment recours, surtout à l’époque de leurs débuts : on prétend même que ce sont eux qui mirent en vogue ce genre d’industrie. Certaines rivalités d’actrices dans nos théâtres les amenèrent à consentir de tels sacrifices pour se procurer des succès factices.

Dans les autres théâtres, les chefs de claque étaient des affairistes, traitant de puissance à puissance avec les directeurs de théâtre, qui s’engageaient, moyennant des rétributions en billets souvent énormes, à soutenir les débuts d’un acteur, ou à assurer le début d’une pièce nouvelle. Il s’agissait de spéculateurs profitant d’un moment critique pour acheter à vil prix des places à un impresario malheureux, désireux d’avoir des fonds pour tenter une dernière partie. Aussi, tandis que les directeurs de théâtre mouraient parfois à l’hôpital après la faillite, la plupart des chefs de claque mouraient riches et honorés.

Les claqueurs ne se contentaient pas seulement d’applaudir : par un perfectionnement que le temps amena, on mêla à ceux-ci des gens ayant une autre spécialité. Les uns exprimaient leur enthousiasme par une exclamation lancée à propos ; les autres étaient chargés d’appeler les pleurs d’autrui par l’usage qu’ils faisaient de leur mouchoir ; d’autres encore devaient attirer l’hilarité générale par un rire aussi spontané, aussi communicatif que possible. Ces derniers s’appelaient autrefois des chatouilleurs.

Source: La France pittoresque

Et si vous lisez l’anglais, une savoureuse description.