Les huitres, elles aussi, ont leur microbiote protecteur …

Des chercheurs ont mis en lumière le rôle essentiel des microorganismes pour la santé des huîtres : tout juste nées, les larves d’huîtres qui interagissent avec une communauté microbienne sont stimulées de manière durable et résistent mieux aux maladies toute leur vie.

Tuiles pour la collecte des naissins

De façon remarquable, il est montré dans cette étude publiée dans la revue Microbiome que cette capacité peut également se transmettre à la génération suivante et que le système d’information épigénétique joue un rôle majeur pour mémoriser cette empreinte microbienne. Ces résultats ouvrent des perspectives prometteuses d’application pour induire une amélioration durable de la survie des espèces aquacoles face aux maladies.

Le « biological embbeding » est le processus par lequel l’environnement d’un individu va influencer son développement pour modifier son phénotype de façon durable. Cette empreinte environnementale aura des conséquences majeures sur le comportement et la santé des individus. Les étapes précoces du développement représentent une fenêtre permissive pour enregistrer ces informations environnementales et le système d’information épigénétique est considéré comme un acteur majeur pour intégrer et mémoriser ces informations pour qu’elles persistent au niveau intra et intergénérationnel. L’interaction avec l’environnement microbien n’échappe pas à cette règle et il est clairement démontré en santé humaine que les étapes précoces de la vie constituent une “fenêtre d’opportunité” au cours de laquelle le système immunitaire peut être façonné par une exposition microbienne appropriée.

Des scientifiques se sont intéressés à cette problématique dans l’objectif de développer des stratégies de lutte contre les maladies infectieuses qui touchent des espèces d’intérêt aquacole, comme l’huître creuse Crassostrea gigas, dont la France est le 1er producteur européen. Leurs travaux ont montré qu’une interaction avec des microorganismes pendant le développement larvaire permettait d’améliorer les capacités immunitaires des huîtres. Les larves exposées gardent en mémoire l’effet de cette exposition et lorsqu’elles atteignent le stade juvénile, les huîtres sont capables de mieux se défendre contre la principale maladie qui touche cette espèce dans le monde, le POMS (Pacific Oyster Mortality Syndrome). Les chercheuses et chercheurs montrent dans la même étude que cette faculté acquise dans les premiers stades de développement est maintenue tout au long de la vie, et se perpétue même d’une génération à l’autre. Cette amélioration ne serait pas due à une sélection d’ordre génétique mais plutôt à des variations épigénétiques qui sous-tendent la mémorisation de cette expérience microbienne précoce.

Au-delà des aspects appliqués au domaine de l’aquaculture vers des pratiques aquacoles respectueuses de l’environnement, ces résultats invitent à réfléchir sur l’importance de la phase précoce d’élevage pour permettre aux individus d’avoir une réponse adaptée à leur environnement et ouvrent des perspectives sur la possibilité d’améliorer la robustesse de certaines espèces vis-à-vis des changements globaux en agissant sur les facteurs environnementaux lors de leur développement larvaire.

Référence

Early life microbial exposures shape the Crassostrea gigas immune system for lifelong and intergenerational disease protection. FalletM, MontagnaniC,Petton B, Dantan L, de LorgerilJ, ComarmondS, ChaparroC, ToulzaE, BoitardS, EscoubasJM, VergnesA, Le GrandJ, BullaI, GueguenY,Vidal-DupiolJ, GrunauC, MittaG, CosseauC. Microbiome. 2022 Jun 4;10(1):85. doi: 10.1186/s40168-022-01280-5

Laboratoires CNRS impliqués

  • Interactions Hôtes Pathogènes Environnement (IHPE – CNRS/ UPVD/Ifremer/UM)
  • Laboratoire des sciences de l’environnement marin (LEMAR – CNRS / IRD / Ifremer / UBO)