Baclofène – Baclocur : les buveurs se rebiffent !

Le Baclofène est un “vieux médicament” toujours utilisé dans sa mission première, celle de myorelaxant. Mais une action secondaire fondamentale s’est avérée, celle de libérer les alcoolo-dépendants de leur dangereux penchant. S’en est suivi une triste manigance où les autorités médicales n’ont une fois de plus, pas le beau rôle …


Le Baclofène est devenu Baclocur … mais à utiliser à quelle dose ?

C’est l’histoire d’un médecin de haute valeur qui avait un penchant pour le bon vin … et qui voulait s’en débarrasser. En 2008, il écrit un ouvrage et apparait sur la scène médiatique pour indiquer (oh, sacrilège!) au grand public qu’une molécule largement utilisée contre les contractions musculaires involontaires et douloureuses ( en particulier la sclérose en plaque), le baclofène, avait une qualité majeure: elle faisait “oublier” aux buveurs leur accrochement à l’alcool. Et ceci sans nausées, sans amnésies, nous dirons en douceur.

Bien sûr, il y a eu de la demande et bien des médecins en ont prescrit aux “malades” hors AMM, c’est à dire hors du champ médical autorisé.

Ces médecins ont vite été repérés et tapés sur les doigts. C’était devenu un produit “à ennuis”.

Ça ne vous rappelle rien ? L’hydroxychloroquine était dans ce cas au plus fort de la polémique: médicament fort connu, pas cher du tout (quelques euros pour une cure), qui concurrence des “petits nouveaux” hors de prix et toujours en cours d’étude … Et qui a fait les gros yeux? Toujours les mêmes …

Car au même moment, d’autres médicaments étaient en cours d’évaluation pour le même but anti addictif. Il a fallu six ans (rappellons que l’alcoolisme est la maladie principale d’au moins 5 millions de français…) pour que les autorités en autorisent l’utilisation sous la bannière d’ATU (autorisation temporaire d’utilisation), mais à la même dose que celle utilisée comme myorelaxant. Or le Pr Amseimen, celui qui a lancé l’affaire, avait toujours annoncé que pour être efficace, il fallait (sans danger particulier) tripler la dose. De ce fait, les médecins qui devaient suivre les notices de l’ATU, ne prescrivaient qu’à dose insuffisante, et il s’est produit deux phénomènes: 1- des échecs de la cure …2- des “petits traffics” pour des buveurs qui devaient trouver d’une manière ou d’une autre leur dose efficace.

En octobre 2018, enfin tombe l’AMM, la fameuse autorisation. Reste à trouver qui sera le fabricant, le distributeur, à quel prix ? C’est Ethyfarm, un jeune labo spécialisé dans les médecines de l’addiction, qui remporte le pompon. Avec d’ailleurs un prix très raisonnable. Mais avec toujours des prescriptions autorisées à doses inefficaces. Le produit est lancé en fanfare courant juin, la presse se félicite de ce succès pour un besoin si énorme … et patatras deux jours plus tard, le tribunal administratif suspend cette autorisation. Stupeur ! Une reculade des Autorités (on a l’habitude, cf la chloroquine)? Hé bien non! C’est une association de malades qui a porté leur problèmes devant la justice, arguant que les doses prescrites étaient inefficaces, et qu’il y avait en quelque sorte tromperie sur la marchandise ! Gonflés, les plaignants! Aussi gonflés que les victimes du Lévothrox “amélioré” qui les rendait malades !

En attendant, la comédie continue, il va falloir refaire ue autorisation pour un traitement à plus forte dose, ou tout au moins la possibilité d’une prescription au delà des 80 mg.

Jean-Yves Gauchet

Source Le Parisien