Essai clinique Discovery: une catastrophe pour la recherche

Onéreux, mal construit, rejeté par nos amis européens, l’essai clinique Discovery fait apparaître une défiance inattendue de la part des patients: ils ne veulent plus prendre du placebo ! Et ceci aura des conséquences à long terme .

Lancé en catastrophe en mars, avec un choix très contestable des molécules testées, des doses à employer, des stades de la  maladie à traiter, des cohortes de malades sélectionnés, l’essai clinique Discovery devait regrouper selon un protocole unique les pays européens pour déterminer très vite sur quelles molécules compter pour (enfin!) soigner les malades avec autre chose que le paracétamol et les respirateurs. A noter: cet essai ne visait que la phase virale.

(Relire cet article sur la pathogénie de l’épidémie)

Les résultats annoncés en haut lieu devaient tomber fin avril. Puis, retard. On apprend par la bande que les deux molécules phare de l’essai (remdesevir, un orphelin d’Ebola et lopinavir/ritonavir, utilisé pour le Sida, une maladie qui n’a rien à voir avec le covid) sont étonnament inefficaces. Et puis on apprend aussi que la France est bien seule dans cet essai: tous les autres européens (sauf le Luxembourg: un malade!) se sont défilés (5000 € par malade, c’est au dessus des moyens de plusieurs pays) pour rejoindre d’autres essais, moins contraignants et mieux construits.

Mais on apprend alors que la cohorte prévue se désagrège. Pour deux raisons principales: contrairement à un cancer ou un diabète, où les malades sont sur un plateau de la maladie, pour le covid, les choses vont très vite: en quelques jours, on est soit sorti d’affaire, soit en extrèmes difficultés. Ce n’est plus une cohorte, c’est un puzzle …

Mais pire encore: les malades se rebiffent. A force d’expliquer “qu’il fallait pour valider un essai” que la moitié des “inclus” soient soignés par un placebo, une bonne partie des malades se sentent cobayes, reculent, ou alors exIgent d’être dans le bras de la chloroquine active … c’est à dire être vraiment soignés.

C’est grave. C’est grave car on assiste là à une défiance vis à vis du processus de validation de toutes les thérapies, moléculaires ou non. Cette défiance durera, surtout lorsqu’on aura fait le bilan des impérities du système médical.

Jean-Yves Gauchet

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